Depuis 2017, je me suis immergé dans le monde des sans-abris de Paris. Au-delà des associations et des structures caritatives ou sociales, je voulais pouvoir entendre des imaginaires et de la pensée, issus non pas du monde qui gagne mais de l’autre, du peuple d’en bas, celui qu’on n’écoute qu’avec la condescendance de ceux qui ont réussi à sauver leurs peaux. Je voulais arpenter les paysages ardus des nuits sur le bitume, de l’absence, de l’abandon et du rêve. Il n’y avait dans ma démarche aucune visée documentaire. À mes yeux, c’est la fiction qui relate le monde. Il s’agissait pour moi de déplacer mon angle de vue, d’élargir les idées préconçues qui m’habitaient en croisant quotidiennement l’errance. J’en ai tiré un scénario pour le cinéma, Un voyage en hiver, qui s’est tourné en 2019 et une pièce de théâtre, Tout l’univers qui sera créée au cours de la saison 2019/2020. Là où il y a un pauvre, il y a un mythe. Regardez un homme ou une femme dormir sur un quai de métro et vous verrez votre esprit parcourir de vastes paysages, votre peur de la perte, du risque pris par ceux qui sont au bout du bout. Rappelez-vous Shakespeare ou les textes sacrés, vous constaterez que le canal spirituel ou divin, la sagesse, emprunte toujours les haillons de ceux qui n’ont plus rien pour délivrer ses vérités. J’ai connu, dans les souterrains parisiens, des personnes qui ne remontaient à la lumière du jour que de temps en temps. Préférant l’obscurité pour dissimuler leurs différences et leurs terreurs, leurs rêves et leurs joies étranges. Dans ces profondeurs où personne ne viendrait les chercher - même les forces de l’ordre ne s’aventuraient pas ici - j’ai croisé des hommes et des femmes qu’il ne fallait pas éclairer dans les yeux, auxquel(le)s il fallait parler avec douceur, parce que des lames et des battes de baseball étaient prêtes à surgir en cas de malentendu. Et aucun recours, aucune protection que soi-même dans ces profondeurs... Il fallait partager pour être admis. Ce sont mes histoires, mon écriture, ma fiction, mon oralité qui m’ont servi de sésame. J’ai mis mon imagination en route avec des êtres à qui personne du monde d’en haut ne s’adresse. J’ai raconté des histoires et j’ai trouvé des trésors à offrir et à recevoir. Là, tout en bas, est né Tout l’univers.
« Qu’est-ce qui reste quand tout a pété ? ». L’auteur et metteur en scène Olivier Brunhes cherche la réponse dans Tout l’univers. Le monologue délicat d’un homme seul, en marge, porté par le très juste Vincent Winterhalter.
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